Entrevue LaPresse Affaires
Article paru dans LaPresse Affaires
Chaque matin, Chantal Dauray se demande si ses chaussures roses brillantes ou ses souliers fermés conviennent à l’une ou l’autre des entreprises qui l’engagent. Ce détail en apparence superficiel représente pourtant l’une des forces de cette conseillère en communications depuis 20 ans: sa capacité d’adaptation.
À l’image des consultants qui réalisent des mandats de courte durée, la professionnelle doit faire sa place rapidement dans plusieurs organisations. «Il faut être un ninja de la connexion, se présenter et s’intéresser aux gens, dit-elle. C’est primordial d’écouter avant de proposer de nouvelles idées. Nos solutions doivent tenir compte de la culture d’entreprise.»
Pour saisir ces subtilités, elle a acquis plusieurs réflexes. «J’essaie d’identifier un allié qui pourra m’expliquer l’organigramme officieux, les influences et les comportements à valoriser. J’observe aussi la décoration, l’aménagement des bureaux, l’habillement des employés, s’ils mangent ensemble le midi ou s’ils grignotent seuls derrière leurs ordinateurs. Ce sont des signes qui parlent beaucoup de la culture interne.»
Saisir la philosophie d’une organisation est au coeur du travail de Marièv Rodrig, directrice artistique. «Pour comprendre les besoins de mes clients, je pose beaucoup de questions, j’analyse et je retiens tout. Je compare aussi ma vision d’une marque en tant que consommatrice avec la réalité. C’est mon travail de m’assurer que l’image d’une entreprise corresponde à sa vision. Et comme j’ai un tempérament caméléon, je m’adapte facilement aux nombreuses compagnies qui m’engagent.»
Cette variété de mandats est l’un des avantages de la vie des consultants, selon Danny Kronstrom, spécialiste web. «C’est très stimulant de changer d’entreprise. On rencontre souvent des gens très intéressants. On découvre des milieux où on n’irait pas naturellement. Évidemment, on ne peut pas prétendre être spécialiste dans tous les domaines. Il faut être honnête avec soi-même et l’exprimer au client conséquemment.»
L’envers de la médaille
Même si Marièv Rodrig adore l’absence de routine dans son travail, elle regrette à l’occasion de ne pas avoir la chance de créer des liens forts avec ses collègues de courte durée. «Ça me manque parfois de ne pas faire partie d’une gang et de créer une synergie créative permanente.» Pour sa part, Chantal Dauray a maintenant une nouvelle façon de voir le sentiment d’appartenance. «On associe généralement ce sentiment à la durabilité dans le temps, alors que des personnes travaillant depuis toujours pour une entreprise peuvent être moins engagées que celles qui s’impliquent pleinement pour une brève période.
«Pour moi, chaque mandat est une mission, ajoute-t-elle. Je me vois comme un capitaine de bateau qui doit mener son équipage à bon port et qui, une fois arrivé, repart dans un autre voyage. Quand j’ai un contrat, je m’investis pour mes clients. Je pense à eux quand je cours et j’ai des flashs pendant mes vacances. Ma réalité implique des fins régulières, mais je dois me rappeler que je suis là comme une bougie d’allumage, pour les inspirer et les sensibiliser.» Danny Kronstrom partage ce sentiment. «J’arrive dans une entreprise pour apporter une connaissance et faire grandir une entreprise avec mon expertise.»
Encore faut-il que l’organisation soit réellement ouverte aux idées du consultant. «C’est arrivé que les membres d’une équipe et moi ne voyions pas les choses de la même manière et qu’ils refusent de lâcher prise sur LEURS idées, relate Mme Rodrig. Je me bats un certain temps, mais à un moment donné, il faut choisir ses batailles. Comme ce sont des mandats contractuels, ça ne vaut pas toujours la peine de perdre son énergie. Il faut savoir lâcher prise au bon moment pour éviter les conflits.»